festival2011

Théâtre En Mots critiques de théâtre et des arts de la scène

 
Théâtre
Rue du croissant
de Philippe Blasband

 

Avec : Mohamed Ouachen
Coach/oeil extérieur : David Strosberg
Scénographe/créateur lumière : Reynaldo Ramperssad
Scénographe/costumière : Ann Weckx
Créateur son : Billy Miquel
Régie lumière et son : Louis Eylenbosch

Diffusion : Nicolas Dubois

 

Rue du Croissant, de Philippe Blasband, avec Mohamed Ouachen

du 8 au 28 juillet 2011
(relâche le 18)
 
à 12H40
 
  Théâtre des Doms
1 bis Rue des Escaliers St Anne
Réservation : 04 90 14 07 99
 
 Durée du spectacle : 1H10
 

 

Coproduction : Théâtre Les Tanneurs (directeur artistique : David Strosberg),  et KVS,  Bruxelles
 

 

Erika, Martine, Rachid, Augustine, Hector, Amélia, André… mais aussi Tchoupi le chat et encore bien d’autres. Leur point commun? Tous habitent Rue du Croissant, une rue bruxelloise typique, c’est-à-dire atypique, voire -si le mot existait- «utypique». Que s’est-il passé Rue du Croissant? Un accident, une agression, un attentat ou simplement un cri, un râle, un rire? En tout cas, tous ont entendu quelque chose, la même chose et autre chose. Ce sont les versions successives de ce bruit qui a littéralement couru que Mohamed Ouachen interprète sur scène en un monologue virtuose qui parcourt à la vitesse du son une centaine de personnages différents. Une performance –c’est le cas de le dire– in-ouïe !

 

 

 

Mohamed Ouachen a un talent évident à incarner toute sortes de personnages. Un comique fin, une sensibilité qui lui permet de faire naître le rire et l'émotion subtilement, d'un geste, une intonation, le développement d'une idée. Il parle doucement, on suit l'endroit où il nous emmène. La pièce commence par son incarnation d'un chat qui se réveille, il raconte comment il a entendu le fameux bruit, à l'origine de l'enquête. Toutes les personnes qui habitent, où bien étaient, Rue du Croissant, feront de même. Des portraits interprétés que l'écriture de Philippe Blasband, coupent net au milieu d'une phrase pour enchaîner celui d'un autre, homme, femme ou animal, tel un clip, les images d'un film coupé-monté à l'arrache. Chacun explique ce qu'il faisait au moment où le cri s'est fait entendre. Une occasion de raconter sa vie, où qu'on l'a devine par quelques phrases, un contexte. La plupart de ceux qui ont vu quelque chose, parle d'une vieille dame agressée par un grand homme. Mais pour certains c'était une jeune fille et la scène était autre. Le comédien passe de l'un à l'autre des personnages, par un changement de voix et de posture. L'une de ces voix fait penser à Elie Kakou. Derrière l'apparence joyeuse le fond est aussi d'un sombre profond, il balaie plusieurs types d'écriture et de sujets. Le texte de la pièce met en lumière la diversité humaine et l'humanité qu'on peut trouver même parmi ceux qu'on réprouvent. La contradiction, le paradoxe, une caractéristique de l'homme, quasi permanente. Beaucoup de non dit, de part d'ombre, qu'on peut imaginer lorsque le comédien sur le coté non éclairé de la scène, entame une danse pendant un moment de "pause" dans le récit, une danse sage qui devient envolée et passionnée. La musique employée comme support à cette danse, est choquante, inconvenante, même si n'est utilisé que le refrain de cette chanson qu'on reconnaît tragiquement, sur d'autres paroles après le titre. Par la poursuite des portraits, on découvre sous la forme de l'ironie, un commerce à plusieurs facettes -blanchiment d'argent-, à l'image des personnes (on regardera différemment le marchand du coin). C'est toujours avec ce même comique, qui fait qu'on ne on ne sait pas si on doit rire, pleurer, s'indigner, s'interroger, qu'on apprends, que les nouveaux émigrants qui vont transformer la Belgique "inexorablement", sont... les Français..! -"Nous allons modifier vos comportements, votre façon de manger, de bouger, votre ville...".  Tandis que les Bruxellois se demandent où ils devront aller, si "la Wallonie va en France", et "les Flamands en Flandre".
Gardons nos différences, nos métissages, dans le respect de celle de l'autre et réciproquement.

Mardi 19 juillet 2011

 

 

 

 

Lors d'une rencontre au Théâtre des Doms le 13 juillet, Emile Lansman -des Editions du même nom,  invitant le comédien Mohamed Ouachen, dira à la fin : "merci pour ton humour, ta sincérité" (et de ce qu'il y a de beaux et bien, dans ce que vous êtes et que vous venez de nous faire partager, lors de cette rencontre notamment). Le spectacle, un one man show se présente comme une ode à la multiculturalité, dans cette Rue du Croissant de Bruxelles. L'homme est élégant, dans ces mots, la justesse, très Belge, à chercher le mot juste, pour exprimer des émotions et ressentis personnels. C'est un vrai plaisir que d'entendre ces choses, où une belle humanité transparaît. Tellement différent de ce dont on est entouré (médias) en France, dans la vie qui n'est pas celle de la création artistique au service de bonnes valeurs. Avec un humour qui lui est naturel, lorsque la question lui est posée, il détaille ses rencontres artistiques à la genèse du spectacle. A ce propos, on apprends qu'un certain David (David Strosberg) est un pour lui une véritable nounou, envahissante, qui l'appelle parfois plusieurs fois par jour, en quête de ses nouvelles... !

 

 

 

Liens :
vidéo de la pièce : http://www.caspevi.com/rue-du-croissant